Géosciences Montpellier
Université de Montpellier
Campus triolet cc060
Place eugène bataillon
34095 montpellier cedex05
FRANCE

par Lise Durand, Jérémie Aubineau, Grégory Ballas, Cédric Champollion, Jean-Baptiste Charlier et Erwan Le Ber

Figure 1 : A : Localisation des zones d’étude. B : échantillonnage dans la partie calcaire, carte géologique 1/50 000 (BRGM). C : zone d’alimentation du Durzon, carte géologique 1/50 000 (BRGM).
La source du Durzon est située dans les grands Causses où des exemples de zones altérées ont été décrits *3 *12 *2. Les échantillons ont été prélevés dans des carrière, cavités et carotte correspondant aux lithologies de la zone d’alimentation du Durzon. Pour chacun des sites, des roches saines et des roches altérées ont été échantillonnées dans de la dolomie (Bathonien et Bajocien) et du calcaire marneux (Kimméridgien et Oxfordien).
L’altération de la dolomie forme du sable dolomitique, c’est ce que l’on nomme par la suite roche altérée. Lors de l’altération du calcaire la roche devient meuble et a un aspect argileux.
La roche saine

Figure 2 : Analyse des échantillons par triple pesée et le sable à l’hélium.
dolomitique étudiée ici à une porosité de 9 à 14% (Figure 2). Les roches dolomitiques considérées dans notre étude comme « saines » sont en fait, déjà en partie altérée. L’existence de porosité est probablement due à la dolomitisation secondaire. Le sable dolomitique, quant à lui, correspond à l’état d’altération final de la roche. Dans le cas du calcaire, la roche saine, à une porosité de 2 à 4%. Les roches de calcaire altérées ne sont pas le résultat d’une altération intense contrairement aux roches dolomitiques, mais représentent différents stades d’évolution, d’où leurs porosités variables (7 à 44%).
En utilisant le MEB sur des échantillons de dolomie, on distingue que la roche dite saine est déjà altérée, ce qui es en cohérence avec les données de porosité. Le sable dolomitique résulte du processus d’altération de la dolomite au niveau des joints de grains.

Figure 3 : image acquise au MEB d’échantillons de dolomie bathonienne saine et alterée.
Pour définir les variations de chimie entre les roches saines et altérées, des analyses XRF ont été réalisées. Ces données sont présentées dans une analyse à composante principale (ACP ; Figure 4). Les roches calcaires altérées (points bleu clairs) ont un signal distinct par rapport à celui des roches saines (points bleu foncés) avec des teneurs plus élevées en Al, Si Fe… (axe 1 de l’ACP). Dans cette analyse, la chimie des marnes pourrait apporter un éclairage complémentaire afin de mieux préciser la géochimie des roches calcaires altérées. Ces résultats sont en cohérence avec la littérature *11 *5. En effet, dans nos résultats il y a une perte en Ca pour les roches saines.

Figure 4 : ACP sur les données XRF des échantillons de roches calcaires (à gauche, couleur froide) et dolomitiques (à droite, couleur chaude).
Pour la dolomie, il n’y a pas de signal géochimique clair qui permette de différencier les roches altérées et saines sur la base des échantillons prélevés. Les images MEB montrent que la différence entre roche saine et altérée est due à la dissolution de la dolomite (Figure 3). Les variations en éléments Al, Si, Mn et Ca seraient principalement dues à la variation minéralogique de la roche mère.
Dans le cadre de notre étude, la géochimie des roches calcaires permet de différencier une roche saine d’une roche altérée, ce qui n’est pas le cas pour la dolomie, néanmoins, leur porosité joue un rôle dans le fonctionnement hydrogéologique. Les résultats d’analyses gravimétriques suggèrent que ces zones altérées pourraient avoir un rôle de stockage sur les 60 premiers mètres de la zone non saturée *8 *7. À titre d’exemple, lors des périodes d’étiages, la teneur en gaz dissous augmente à la source. Ce phénomène peut alors être relié à la mobilisation d’eaux stockées dans des zones à porosité importante -en particulier celle du sable dolomitique- favorables au piégeage d’excès d’air *9. L’hydrochimie de la source montre également des variations importantes en Ca lors des périodes d’étiages *10. À ce stade, il n’est pas encore possible de conclure sur l’existence d’un lien entre hydrochimie et géochimie. Cependant, le rôle des zones altérées dans la constitution de réserves mobilisées lors des étiages est une hypothèse innovante et réaliste qu’il convient de continuer à investiguer. Des prélèvements d’eau à proximité des zones altérées ont été réalisées et les analyses (en cours) permettront de compléter le jeu de données.